Abéché, chef-lieu de la province du Ouddaï, autrefois une ville cosmopolite animée, est aujourd’hui confrontée à une série de défis majeurs depuis l’escalade de la crise soudanaise. Classée troisième ville du Tchad après Moundou et la capitale tchadienne N’Djamena, Abéché subit aujourd’hui des transformations profondes en raison de l’afflux massif de réfugiés venant du Soudan notamment du Darfour.

Depuis le début de la guerre au Soudan, un nombre croissant de populations a migré vers le Tchad, cherchant refuge dans des villes frontalières comme Abéché. Cette migration a profondément modifié la vie quotidienne des habitants, affectant particulièrement les aspects économiques, sociaux et sanitaires.

Cherté de la vie et pénuries de biens de consommation

Salima Saleh Mahamout, présidente de l’association « Voix de la Femme » pour la médiation, la réconciliation et le leadership féminin et leader de la société civile, dénonce la montée en flèche des prix des biens de consommation à Abéché. « Depuis l’arrivée des réfugiés, la vie est devenue de plus en plus chère. Le sac de mil, qui coûtait auparavant 500 F CFA, se vend désormais à 1500 F CFA. L’oignon est passé de 1750 F CFA à 2000 F CFA, et le bidon d’huile est désormais vendu 25 000 F CFA, un record absolue. C’est inacceptable », déclare-t-elle, soulignant les difficultés accrues pour les populations locales.

Infrastructures et sécurité en détérioration

Issa Mahamat Issa, résident du quartier « Aljazera », fait état d’une recrudescence de la criminalité à Abéché. « Les braquages à main armée et les vols de biens sont désormais quotidiens. La prostitution a aussi pris de l’ampleur, et la ville est de plus en plus encombrée. Les logements sociaux, eux, sont devenus hors de prix, voire inexistants. Une maison, qui se louait auparavant à 10 000 F CFA, coûte aujourd’hui 30 000 F CFA. Cela rend la situation intenable pour les étudiants et les familles locales », explique-t-il.

Pression sur les services publics et les établissements éducatifs

Ibrahim Oussman, étudiant, déplore l’impact de l’afflux de réfugiés sur les services de santé et d’éducation. « Les structures sanitaires sont débordées. Les réfugiés bénéficient d’une prise en charge prioritaire grâce aux ONG, tandis que les habitants locaux doivent attendre. Dans les écoles, les réfugiés sont également priorisés, laissant les autochtones dans l’incertitude quant à leur place. Nous demandons une évaluation de la situation et, si nécessaire, un rapatriement des réfugiés vers les camps qui leur ont été attribués », demande-t-il.

L’impact de cet afflux de réfugiés à Abéché est considérable, tant sur le plan économique que social. Il soulève des questions cruciales sur la capacité de la ville et du Tchad à gérer cette crise humanitaire tout en préservant la qualité de vie des populations locales.

Ahmat AbdelRamane Kikigne, Abéché, flashtchad.com

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