Il porte un nom lourd d’histoire, mais s’est toujours refusé à en faire un étendard. Albadour Acyl Ahmat Akhabach est le fils du feu Acyl Ahmat Akhabach, figure centrale de la scène politico-militaire tchadienne des années 1970 et 1980, ancien ministre des Affaires étrangères et homme d’influence au destin tragique. Pourtant, Albadour a choisi une voie différente. Là où son père maniait les armes et les discours avec fougue, lui a opté pour la discrétion, la diplomatie et la patience.

Né en 1967 à Mongo, dans l’ancienne préfecture du Guéra, il grandit entre les mutations de son père et les secousses d’un Tchad instable. Ce parcours nomade le met très tôt en contact avec la diversité culturelle du pays et l’ouvre au monde. Une ouverture qu’il consolidera plus tard avec une formation en relations internationales, choix de cœur et d’orientation.

C’est à Paris, en 1995, que débute sa carrière diplomatique. Il y est nommé attaché chargé des affaires militaires et de sécurité à l’ambassade du Tchad. Son profil attire rapidement l’attention du président Idriss Déby Itno, qui voit en lui un atout dans l’architecture diplomatique du pays. En 1998, Albadour rentre à N’Djamena pour intégrer le protocole d’État, une fonction clé qu’il occupe avec sérieux, intelligence et sans tapage.

Mais c’est dans la coulisse des grandes manœuvres régionales qu’il se révèle. Artisan discret du réchauffement entre le Tchad et la Libye à la fin des années 1990, il facilite l’organisation d’un vol historique entre Faya et Albeda, brisant ainsi l’embargo sur la Libye. Derrière cet acte, une vision, replacer le Tchad au cœur des équilibres régionaux et montrer que la diplomatie peut être aussi décisive qu’un coup de force sans les dommages collatéraux.

Son efficacité lui vaut d’être décoré Chevalier puis Officier de l’Ordre National du Tchad. Mais Albadour n’est pas un homme de décorations. Il préfère les réseaux feutrés aux tribunes, les actes aux effets d’annonce. Nommé en 2002 conseiller culturel à l’ambassade du Tchad à Paris, il prend en charge les relations avec l’UNESCO et la Francophonie, défendant un Tchad méconnu mais riche de son patrimoine intellectuel et artistique.

Quand les conflits armés menacent à nouveau l’équilibre du pays dans les années 2000, Albadour ne se dérobe pas. Au sein du FUC, du CDR ou encore dans les négociations avec l’UFR, il mobilise ses relations pour ouvrir des passerelles vers la paix. Le dialogue, dit-il souvent, est une stratégie de long terme, pas un signe de faiblesse. Et c’est par cette méthode qu’il favorise le retour de plusieurs mouvements armés sur la scène politique nationale.

Aujourd’hui encore, au poste de président du Conseil d’administration de la Nouvelle Société Textile du Tchad (NSTT), il incarne une autre manière de servir l’État, calme, constante, non spectaculaire mais efficace. Albadour Acyl Ahmat Akhabach n’a pas cherché à briller. Il a préféré durer.

Dans un pays souvent traversé par les excès, il incarne cette modération rare, ce sens du devoir hérité sans ostentation, et cette fidélité au Tchad que ni les orages politiques, ni les ruptures générationnelles n’ont altérée. Il ne s’impose pas : il compose. Il ne revendique pas, il agit.

Et dans le silence des hommes justes, il laisse une trace. Durable.

Flashtchad.com

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